mardi 16 mai 2017

4amb5, Barcelone




Voila une expérience plutôt très inédite pour moi que cette table dans le quartier du Raval. Je vais être très clair, je ne suis ni végétarien et encore moins végétalien. Tout ce tapage actuel autour de ces concepts vegan ne me concerne pas. Cependant je suis un grand amateur de légumes et souvent ce qui m’a ému le plus dans de grandes tables, ce sont les assiettes autour de ceux-ci. Alain Passard en est un bon exemple, le gargouillou de Michel Bras restera un très grand classique et plus récemment le « Satio Tempestas » de Frantzen à Stockholm. C’était donc avec beaucoup d’espoir que je souhaitais découvrir cette nouvelle table de Barcelone appelée « 4amb5 ». Un nom catalan qui simplement signifie « 4 et 5 », qui est simplement le numéro de l’adresse sur la rambla del Raval.  Soyons clair, même si la table semble faire partie de l’établissement voisin de « Suculent », ce n’est absolument pas le cas. Ils sont simplement côte à côte et en très bon termes ; aucune relation culinaire donc avec Carles Abellan.

Ce qui fait donc la particularité de cette table, c’est de ne proposer que des plats autour des légumes. Pas un restaurant végétarien mais « les légumes » sous toutes ses formes, préparés parfois avec des protéines animales protéines issues de la viande et des produits carnés, du poisson et des fruits de mer, du lait et des produits laitiers ou encore des œufs. Concrètement certaines assiettes ne sont que des légumes mais avec un fond de sauce de viandes pour illustrer l’idée. Donc tout pour me séduire à priori.

Deux chefs, Toni Romero et Quim Coll.  Quim fit des études dans la célèbre école Hofman, des passages dans les réputées tables comme Gaig et Petit Comité, second de cuisine dans l’ancien Comerç24 de Carles Abellan. Toni aussi chef de cuisine du voisin Suculent.

C’est donc sur la rambla que vous trouverez cet établissement. On appuie sur une sonnerie sur le côté droit du mur et une porte coulissante s’ouvre.



Une salle en longueur, un plafond plutôt assez bas, un comptoir ; le tout boisé dans un style pas si éloigné de l’établissement voisin. Ce qui est un peu étrange, c’est le fait de se trouver seul et de ne voire personne ! On se demanderait presque si l’établissement est ouvert !




Je traverse une seconde salle, elle aussi vide avec des tables dressées, une décoration murale composée de bocaux de conserves et me demande où est donc bien passé le personnel ? Puis quelques instants plus tard je vois au loin quelqu’un sortir de je ne sais où…En fait les cuisines se trouvent en fond de salle et cela sera ensuite une incroyable surprise.



Une jeune femme m’accueille, me fait passer à travers la cuisine, ouvre une porte coulissante et vous voilà dans une autre salle à manger complètement cachée et qui elle est peuplée. Salle au très haut plafond, parois murales en bois avec des jardinières dans lesquelles poussent des herbes. Surprise totale donc après quelques inquiétudes. Etant en période de vacances de Pâques, la clientèle a donc été concentrée dans cette partie du restaurant.





Tout est ici en bois, un dressage de table épuré, c’est plutôt très réussi.




La carte est ici comme je l’ait dit exclusivement composées de plats autour du légume et en guise d’amuse-bouche, nous voici amenés des radis assaisonnés d’un peu d’huile et vinaigre.


Les menus se déclinent en trois versions de 5, 9 et 11 plats et desserts de 35 à 65 euros. Pour avoir un aperçu le plus large de cette cuisine nous avons choisis la version 11 plats mais je recommanderai la version en 9 car vous verrez plus tard que certains plats centraux sont « un peu dans le même esprit » et malgré tout cela aura été assez copieux. Les plats de ces menus sont aussi à la carte mais il vaut mieux se laisser guider. Des intitulés vraiment très alléchants et parfois mystérieux comme par exemple ces croquettes d’algues. La croquette est un classique mais comme on le comprend la farce a été réalisée avec de l’algue nori. C’est ingénieux mais surtout vraiment délicieux.



Une magnifique assiette avec un dressage particulièrement soigné pour ce tartare de betteraves entouré de jaune, des œufs de saumon, des oignons verts, du sésame et de la ciboulette. Association de saveurs parfaite et une belle finesse de la réalisation.


Le pain maison est aussi excellent.


Très bons artichauts aux pistaches et au curcuma. A nouveau très joliment présenté avec des fleurs de capucines sur le dessus, l’artichaut est confit et rempli d’une crème de pistache, l’épice amène une légère saveur orientale au tout. C’est vraiment une très belle recette.


Ensuite des asperges blanches et vertes dans une sauce aux palourdes. Cuisson parfaite pour le légume, une sauce marine qui s’harmonise parfaitement avec. Une association de fruits de mer avec les asperges est à nouveau une belle idée. J’ai bien aimé la découpe du légume en tronçon et aussi sous forme presque de pâtes.


Surprenant prochain plat avec le cabillaud pil-pil et topinambours. Un visuel avec tout d’abord la peau du poisson, sur le dessus les petits morceaux de topinambours, la traditionnelle sauce du pays basque à base d’ail et également quelques petites touches d’une sauce plus acidulée pour donner un coup de fouet à l’assiette.


Bouillon de rascasse en « pain perdu ». Il s’agit de pain poêlé entouré d’une impressionnant fond de sauce, réalisé avec de la rascasse. Une très grande puissance en bouche qui s’harmonise magnifiquement avec le pain. La référence au « suquet catalan » est évidente et repensée de manière très convaincante.


Un peu dans le même esprit, le chou-fleur rôti au poulet à l’ail. En fait c’est un fond de sauce réalisé avec la volaille qui recouvre les pousses du légume. On trouvera aussi des fines lamelles d’ail frits.


Un plat avec un autre fond de sauce tout aussi intense que les précédents. Un ragout de navets au lapin avec son foie-gras préparé en crème.


Ensuite de l’ail rôti avec un fond d’agneau. Toujours aussi impressionnant la manière dont les fonds de sauce sont préparés mais quatre plats cela fait un peu beaucoup. Il n’y a pas à remettre en question la qualité de toutes ces sauces, elles sont parfaites mais forcément un peu écœurantes à la longue. On accompagne donc la purée de l’ail sur des petites tranches de pain grillé avec des radis et quelques jeunes pousses et pignons.




Et pour suivre une « entrecôte » de chou braisé qui présente le chou recouvert d’un jus de bœuf très dense. Et à nouveau ce fond est une perfection mais quand je disais que 9 plats suffiraient c’est parce que là on aligne les plats avec des saveurs très intenses.


Pour terminer, le « sans tripe », en réalité une préparation qui souvent est une association de tripes et pois chiches comme un « cocido » mais comme le nom l’indique qu’avec la légumineuse.


En premier dessert, quelques fraises que l’on trempera dans une huile d’olive et balsamique.



Puis une fine glace aux pommes Granny Smith.


Une excellente crème au maïs qui ressemble à la base de crème catalane mais sans le caramel croustillant, mais du zeste de citron vert et des grains de maïs croquants.


Et finalement des petits beignets à la crème au yuzu.


Un très agréable vin, le Priorat blanc Bellmunt du Mas d’en Gil. Grenache et Viognier, des arômes d’écorces d’oranges, floral, avec un final minéral.


Un concept de restauration vraiment nouveau ou alors très dans la tendance actuelle mais qui n’est pas comme je l’ai dit un restaurant végétarien mais une ode aux légumes avec d’impressionnantes associations, des sauces qui mettent parfaitement en valeur chaque assiette. Chaque assiette avec des textures et saveurs différentes, des dressages raffinés ; une adresse à absolument découvrir et qui séduira également les non végétariens.

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